Il y a un an le peuple togolais s’est rendu aux
urnes pour élire son président de la République. Si les résultats publiés depuis
donnent le président sortant réélu et qui, a d’ailleurs, entamé un nouveau
mandat à la tête du pays, dans les rangs de l’opposition on conteste toujours
cette victoire et on appelle à la vérité
des urnes. C’est dans ce sens que trois personnalités, acteurs des droits de l’Homme
viennent de sortir une déclaration à l’occasion du premier anniversaire de
cette consultation électorale. Nous vous proposons leur déclaration.
DÉCLARATION
22 Février 2020 – 22 Février 2021 : Exigence de la
vérité des urnes au Togo pour que cesse l’illégitimité du pouvoir.
22 Février 2020 – 22 Février 2021, cela fait déjà un
an jour pour jour que s’est déroulé le scrutin présidentiel au Togo, dans un
contexte politique très hostile à toutes les libertés, et un cadre électoral
qui était loin de lui garantir le minimum de transparence, d’honnêteté et de
crédibilité au regard des normes standard internationales. Et pourtant, toutes
les irrégularités et tous les vices qui ont infesté, émaillé et caractérisé ce
processus électoral dans son ensemble, ont fait l’objet de vives et constantes
dénonciations de la part des acteurs de la vie sociopolitique sur le plan
interne, mais aussi sur le plan international, avec la position de l’Union
Européenne (UE) qui s’est abstenue de s’engager dans le processus pour absence
d’intégrité, en refusant d’envoyer ses observateurs à cet effet.
Le 26 Février 2020, dès après la proclamation des
résultats provisoires du scrutin, les États-Unis ont, par le biais d’un
communiqué de presse, émis de sérieux doutes sur la crédibilité, la transparence
et l’intégrité de tout le processus électoral et sont restés très « préoccupés par les efforts d’observation
limités, notamment la décision décevante de la CENI de révoquer l’accréditation
d’une organisation de la société civile neutre accompagnée par les États-Unis ».
Il s’agit là d’une référence à l’expulsion, trois jours avant l’élection, des
experts du National Democratic Institute (NDI), qui devaient prêter main forte
à une organisation locale pour observer le scrutin. Le Département d’État américain
a, par conséquent, demandé au gouvernement togolais de prendre des mesures afin
d’accroître la transparence et la confiance de tous en les résultats finaux en procédant
à la publication des résultats bureau de vote par bureau de vote.
De même, la Conférence des Évêques du Togo (CET) a,
par son Message en date du 1er Mars 2020, lancé un appel ainsi qu’il suit : « Afin de résoudre la crise qui s'est
installée dans le pays et restaurer la confiance, la Conférence des Évêques
exhorte les différents protagonistes et les instances du processus électoral à
œuvrer pacifiquement au rétablissement de la vérité des urnes ».
Aujourd’hui, un an après le scrutin présidentiel du
22 Février 2020, tout le débat sur la crédibilité et la sincérité de ces
résultats proclamant vainqueur le candidat sortant, Monsieur Faure Essozimna Gnassingbé,
reste entier et refait nettement surface.
En effet, dans une lettre en date du 16 Février
2021, publiée à Paris, que Monsieur Sébastien Nadot, Député de Haute Garonne,
Représentant de la Nation française, membre de la Commission des affaires
étrangères de l'Assemblée Nationale française, a adressée à Monsieur Emmanuel
Macron, Président de la République française et portant en objet « Demande de démenti officiel de la part de
l’Élysée vis-à-vis de la fausse lettre de félicitations du Président Emmanuel
Macron au Président Faure Gnassingbé », il est écrit ceci : « Peu de temps après ce viol de la démocratie
togolaise, une lettre de félicitations de votre part adressée à M. Gnassingbé
était diffusée par les médias togolais à la solde du pouvoir afin d'accréditer
la reconnaissance internationale de la victoire de M. Gnassingbé. Ce qui semble
être un faux grossier n'a pourtant jamais été publiquement démenti par l’Élysée.
Il en va tout de même de l'usurpation de la signature du Président de la
République française ».
D’ailleurs, à l’annonce de ces messages de félicitations
au travers les ondes de Radio France Internationale (RFI), des organisations de
la société civile togolaise, réunies au sein du Front Citoyen Togo Debout
(FCTD) ont, par une déclaration rendue publique le 31 mars 2020, manifesté leur
profonde indignation et leurs préoccupations quant aux valeurs et principes de
liberté, d’égalité, de démocratie, d’État de droit et de respect des droits
humains véhiculés par ces « grandes
puissances et démocraties », en estimant, à juste titre, comme Edmund Burke,
que « la seule chose qui permet au mal de
triompher est l’inaction des hommes de bien ».
Qu’il nous soit permis de remercier Monsieur le
Député Sébastien Nadot, ainsi que toutes les bonnes volontés, aux plans
national et international, qui n’ont jamais cessé de manifester leur solidarité
et leur détermination aux côtés du peuple togolais martyr dans sa noble et
juste aspiration à la liberté et à l’État de droit.
Ces différentes prises de position sont très
importantes et ne peuvent laisser les Togolais indifférents, et ce, quel que
soit leur bord politique, à moins de nourrir la dictature ou de démissionner de
leurs responsabilités citoyennes. Il devient donc plus qu’urgent, voire
impérieux de redonner un sens aux élections dans notre pays, le Togo, en
soldant définitivement l'éternel contentieux des fraudes électorales par la
recherche de la vérité des urnes de l'élection présidentielle du 22 février
2020. Et si les Togolais que nous sommes, n’exigent et n’obtiennent pas ce
droit inaliénable, plus aucune élection n’aura de valeur sur la « Terre de nos Aïeux ».
C'est ici l'occasion d'en appeler au sens de la
responsabilité des partis politiques de l'opposition démocratique afin qu'ils
mettent fin à leurs querelles intestines futiles pour se concentrer sur l'essentiel
: la libération du peuple togolais du joug de la dictature et l'avènement de la
démocratie, qui sont, en principe, leur mission et leur raison d'être.
Les Togolais sont fatigués et épuisés de subir,
impuissants, les coups de force électoraux qui constituent un frein majeur à
leur épanouissement et au développement socio-économique de notre pays.
L'absence de transparence dans les processus électoraux reste la principale
cause du désamour et de la crise de confiance qui perdurent entre le peuple et
l'État. Le sentiment d'exaspération consécutif à la dernière présidentielle,
s’il n’est pas résorbé de manière efficiente et sincère, peut être source d'une
instabilité aux conséquences incalculables pour toute la nation togolaise.
C’est pourquoi les signataires de la présente déclaration invitent tous les
acteurs de la vie sociopolitique togolais, à savoir les leaders d’opinion, le
Clergé, les organisations de la société civile et religieuses, la diaspora
togolaise, les partis politiques, à un véritable sursaut patriotique, à placer
le Togo et le peuple togolais au centre de toutes leurs actions et au-dessus de
toutes autres préoccupations, en vue d’œuvrer ensemble à la résolution
définitive, et une fois pour toutes, de l'éternel contentieux des fraudes
électorales par la recherche de la vérité des urnes de l'élection
présidentielle du 22 Février 2020.
Nous tenons à rappeler solennellement que l’élection
est un droit fondamental de tout citoyen au sens de l’article 21 de la
Déclaration Universelle des Droits de l’Homme du 10 Décembre 1948 qui dispose
que : « 1. Toute personne a le droit de
prendre part à la direction des affaires publiques de son pays, soit
directement, soit par l'intermédiaire de représentants librement choisis.
2. Toute personne
a droit à accéder, dans des conditions d'égalité, aux fonctions publiques de
son pays.
3. La
volonté du peuple est le fondement de l'autorité des pouvoirs publics ; cette
volonté doit s'exprimer par des élections honnêtes qui doivent avoir lieu
périodiquement, au suffrage universel égal et au vote secret ou suivant une
procédure équivalente assurant la liberté du vote ».
La lutte du peuple togolais, malgré les obstacles
prémédités pour la mettre en échec, triomphera nécessairement.
Fait à Lomé, le
22 Février 2021,
Ont s igné :
Monsieur Ayayi
Togoata APEDO-AMAH,
Enseignant-chercheur,
Ancien Secrétaire Général de la Ligue
Togolaise des
Droits de l'Homme (LTDH)
Monsieur
Monzolouwè B. E. ATCHOLI KAO,
Président de
l'Association des Victimes
de la Torture au
Togo (ASVITTO)
Me Raphaël Nyama
KPANDE-ADZARE,
Avocat au Barreau
du Togo, Ancien Président de la Ligue
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